20_MOT_125 - Motion Marc-Olivier Buffat et consorts - Pour plus de transparence dans l'élection des membres du Bureau et de la présidence du Grand Conseil.

Séance du Grand Conseil du mercredi 16 juin 2021, point 7 de l'ordre du jour

Texte déposé

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M. Jean Tschopp (SOC) — Rapporteur-trice de majorité

Avec cette motion, M. Buffat propose d’encadrer et de prévoir un certain contrôle sur la procédure de nomination de la présidence du Grand Conseil. Vous vous en souvenez, l’incident survenu au début de l’année 2020 a été un épisode douloureux, avec un président en exercice contraint de devoir renoncer à son poste. Cette situation a porté notre collègue Marc-Olivier Buffat à la réflexion et c’est pourquoi il nous propose une procédure qui permette de contrôler que le candidat ou la candidate à la présidence du Grand Conseil n’a pas de condamnation pénale entachant son intégrité dans le rôle important de représentation du Parlement. Telle est, en gros, la demande que présente notre collègue Marc-Olivier Buffat. Il soulève l’importance de la transparence, à l’heure où les réseaux sociaux et les médias ont gagné une telle portée que ce cas de figure peut se représenter.

S’agissant des modalités de vérification, plusieurs pistes sont envisagées dans le texte de M. Buffat. La discussion en commission à ce sujet a été intéressante. Le point est évidemment délicat, mais parmi les options envisagées, M. Buffat retient notamment un organe restreint – qui ne serait pas forcément composé de membres du Grand Conseil, mais de personnes externes à l’institution, tenues bien évidemment à un devoir strict de confidentialité – composé de trois personnes qui pourraient vérifier le passé pénal des candidats à la présidence du Grand Conseil. Ce contrôle pourrait d’ailleurs déjà se faire au moment d’accéder à la vice-présidence du Grand Conseil. Naturellement, on peut estimer que ce contrôle devrait être fait par les partis, mais une difficulté a été rencontrée : chaque parti politique décide de faire ces vérifications, mais aussi parfois de ne pas les faire, car il s’agit de questions sensibles et délicates. Par ailleurs, même les partis qui les font procèdent sans doute de manière différente de cas en cas.

Pour protéger notre institution ainsi que la présidente ou le président du Grand Conseil, la majorité de la commission recommande au Grand Conseil la prise en considération de cette motion, par 11 voix contre 5. La commission précise que si cette proposition devait être acceptée, ce serait à la Commission des institutions et des droits politiques de trouver un aménagement dans la loi pour mettre cette demande en œuvre.

M. Raphaël Mahaim (VER) — Rapporteur-trice de minorité 1

Pour la minorité de la commission que je représente, la motion de notre collègue Buffat pose beaucoup de problèmes pratiques et incarne une vision de l’engagement politique moralisatrice et déplacée. Pour cette raison, je vous invite à refuser cette motion, qui n’a pas été transformée en postulat et qui est donc contraignante, alors que, comme j’aurai l’occasion de le dire dans un instant, elle pose toute une série de problèmes pratiques. Permettez-moi de commencer par une petite liste qui illustre le fait que certains élus passent régulièrement sous Les Fourches caudines de la justice pénale ; il s’agit de cas réels, mais anonymisés :

  • M. L., ancien conseiller national, condamné pour fraude électorale ;
  • M. A., conseiller national en exercice, condamné pour discrimination raciale ;
  • M. B., ancien conseiller national, condamné pour contrainte et appropriation illégitime ;
  • M. L., ancien président du Conseil des Etats, condamné pour faux dans les documents et ivresse au volant ;
  • M. G., conseiller national en exercice, condamné pour homicide par négligence ;
  • M. B., ancien syndic vaudois, condamné pour lésions corporelles graves et violation grave de la circulation routière ;
  • M. G., ancien municipal vaudois, condamné pour gestion déloyale des intérêts publics ;
  • J’en passe et des meilleures…

Le but de cette liste n’est pas de faire l’apologie des infractions pénales ni de dire « circulez, il n’y a rien à voir », mais de montrer que ces personnes ont connu des fortunes diverses : certaines ont été immédiatement destituées par leur parti, d’autres ont connu une procédure pénale assez scabreuse qui a finalement conduit à la non-réélection, alors que le président du Conseil des Etats que j’ai cité a été élu à la fois à la Chambre haute et à son perchoir, après avoir commis certaines, voire la totalité des infractions pour lesquelles il a été condamné.

Savoir si un élu est digne d’exercer une fonction est une appréciation politique, au sens noble du terme. C’est une décision de l’organe souverain, qui décide avec ses tripes si, oui ou non, la personne est digne d’exercer la fonction qu’elle brigue. Il ne peut revenir à une délégation de personnes, quelles qu’elles soient, d’agir en tant que filtre éthique au sein de l’institution en question.

J’en arrive ainsi au premier problème principal de la proposition de notre collègue Buffat : si nous confions à un organe institutionnel le soin d’être le filtre éthique permettant de savoir qui a le droit de siéger à la présidence du Grand Conseil et qui ne l’a pas, dans l’hypothèse où cet organe ferait erreur – si par exemple il demandait un certain nombre de documents sur la base desquels il déclarerait qu’il n’y a pas de souci à élire la personne, mais qu’il s’avérait ensuite que certains éléments n’étaient pas connus ou que la situation avait évolué depuis – le discrédit rejaillirait sur l’institution. C’est la raison pour laquelle je vous invite à réfléchir, en termes de responsabilité individuelle – cela m’amuse de rétorquer cet argument à notre collègue Buffat – comme aussi en termes de parti. Si un parti estime que telle ou tel est digne d’exercer une fonction, il revient à lui seul d’assumer la responsabilité politique d’un petit souci ou d’un problème pénal plus grave de cet élu. Le remède proposé par notre collègue Buffat me semble ainsi pire que le mal. Admettons que l’un de nos prochains présidents du Grand Conseil – ou présidente, mais dans la liste que j’ai citée, il n’y avait pas une seule femme et pourtant j’ai cherché – venait à être condamné alors qu’une commission d’éthique, une délégation d’éthique, voire le Bureau du Grand Conseil, avait préalablement émis un préavis positif, le discrédit rejaillirait encore bien plus fortement sur le Grand Conseil tout entier que dans l’affaire de notre ancien président.

La proposition me semble encore poser deux autres problèmes, que je vous présente brièvement. Tout d’abord, où placer le curseur ? Tout le monde comprend que si l’on a tué son père et sa mère, cela pose un petit souci pour accéder aux plus hautes fonctions politiques. A l’inverse, on comprend que si l’on s’est ramassé « une bûche » pour un parcage illicite, cela ne concerne ni le Grand Conseil, ni la population, ni les médias. Alors, comment placer le curseur entre ces deux situations ? Et qu’en est-il d’avoir des poursuites ? Comme on l’a vu avec l’affaire d’un ancien juge cantonal, avoir des poursuites est déjà délicat. Estime-t-on qu’aucun député ne doit avoir de poursuites ? Pour ma part, je vous avoue qu’il m’arrive d’en avoir et je pense que cela arrive aussi à certains d’entre vous. Faut-il estimer que cela devient grave à partir d’un certain montant, mais qu’une petite poursuite n’est pas grave ? Par ailleurs, que faisons-nous s’agissant du domaine pénal ? Dans la liste citée tout à l’heure, les infractions pour lesquelles différents élus ont été condamnés sont assez graves. Un filtre éthique permet-il d’estimer lesquelles sont rédhibitoires ? Si la population souhaite ces élus, elle doit être capable de le dire. Il paraît extrêmement délicat qu’une commission dont la légitimité est douteuse filtre cela en amont.

Last but not least, des informations très sensibles seront communiquées à cette commission ou délégation d’éthique. Si elle en vient à demander des extraits de casier judiciaire ou du registre des poursuites, elle demande à la personne candidate à la fonction de président de se mettre à nu. Comme tout le monde le sait, nous avons le secret de commission des plus stricts et on pourrait même imaginer un secret de commission particulièrement renforcé pour ce type de mécanisme, mais je vous le demande en toute franchise : peut-on être certain qu’il n’y aura jamais de fuites au sujet des casseroles que l’un ou l’autre d’entre nous viendrait à traîner devant cette commission d’éthique ? Si la commission auditionnait un jour un potentiel candidat à la présidence du Grand Conseil alors que ce dernier est actuellement en procédure pénale pour une infraction relativement grave, je suis navré de le dire ainsi, mais j’ai beaucoup de peine à m’imaginer qu’à aucun moment, les adversaires politiques ne vont en faire un thème et le médiatiser ; cela pose tout le problème de la confidentialité des informations. Ce n’est pas ainsi que je conçois le travail de notre Parlement. A l’inverse, si ce travail était fait à l’interne des partis, on ose espérer que la confidentialité pourrait être beaucoup mieux préservée. Evidemment, ce n’est pas toujours le cas, mais tout de même, on peut imaginer des procédures internes mieux organisées pour que la confidentialité soit respectée.

Pour toutes ces raisons, nous estimons que la proposition qui nous est faite est discutable sur le plan de la conception de la politique ; ainsi, elle constitue un remède probablement bien pire que le mal traversé par le Parlement avec l’épisode malheureux de notre ancien président. Enfin, elle pose des questions très délicates sur la manière de la mettre en œuvre. La minorité de la commission vous invite donc à rejeter la motion.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je remercie les auteurs des deux rapports, mais évidemment plus particulièrement l’auteur du rapport de majorité. Ne dit-on pas que ce sont avec les expériences – bonnes ou mauvaises – que l’on progresse et  avance ? Il faut être clair : la proposition qui vous est faite n’est pas une « Lex Untel ou Unetelle », mais tout de même, après une affaire qui a beaucoup secoué ce Parlement, il s’agit de tirer certaines conclusions et d’imaginer comment éviter ce genre de situations, douloureuses à vivre pour la personne impliquée, pour le parti qui a présenté le candidat, et finalement pour l’ensemble de notre Grand Conseil. Je n’ai pas besoin de vous rappeler combien de débats nous avons eus sur les questions de transparence de la vie politique et des partis politiques. Les mêmes règles doivent évidemment s’appliquer lorsqu’il s’agit d’élire le président de notre Grand Conseil.

J’entends les remarques de M. Mahaim, mais je crains qu’il n’ait pas compris le sens de ma proposition. Je n’entends pas soumettre les 150 députés à un contrôle éthique ; il s’agit uniquement de l’élection à la présidence. Et je vous rappelle que cela n’intervient pas tous les mois, mais une fois par année – en principe. Dès lors, l’exercice demandé n’implique pas une complexité folle. L’élection du premier citoyen de ce canton est importante du fait de la représentation qu’elle implique, du rôle de représentation de ce premier citoyen, pour l’ensemble de la population, c’est-à-dire pour nous toutes et tous. Aujourd’hui, il n’y a aucun contrôle. Nous élisons des juges cantonaux qui passent devant la Commission de présentation. Or, ensuite d’une affaire délicate, cette commission a renforcé ses contrôles. A ma connaissance, elle ne s’est pas posé 1052 questions éthiques pour savoir si oui, quand et comment faire son travail. J’imagine que certaines candidatures n’ont pas été jugées recevables ou, en tout cas, que l’on a procédé à certaines enquêtes ou certains contrôles, ou au minimum à un dialogue ; en effet, je rappelle que le candidat doit se présenter devant la Commission de présentation.

Il me semble qu’entre zéro contrôle et un filtre minimal, il y a matière à discuter et à légiférer pour mettre en place un système permettant d’éviter ce genre de désagrément. Il ne s’agit pas de curiosité plus ou moins mal placée, mais de protéger l’institution qu’est le Grand Conseil et sa présidence. Nous avons déjà eu ce genre de discussions : qu’est-ce qu’un avantage induit ? Trois avocats se sont exprimés successivement - la jurisprudence va progresser. Quelle est la définition d’un lien direct ou indirect  avec l’activité d’un élu ? Ce sont des problèmes délicats et des questions d’appréciation. Une fois les éléments connus, il vous appartiendra de choisir ; chacune et chacun dans cet hémicycle a peut-être des notions d’éthique et de valeurs différentes, mais c’est notre choix. Au même titre que notre collègue Mahaim rappelait certaines condamnations pénales, si une personne condamnée pénalement se présente devant les électeurs et que ces derniers l’élisent, c’est leur choix. On en voit des exemples éclatants en France. Dans des micros-trottoirs, on peut entendre de certaines personnes : « On sait que c’est une crapule, mais il dirige bien notre commune. » C’est le choix démocratique, la transparence, et l’électeur assume son choix. J’estime que nous devons avoir les mêmes prérogatives, c’est-à-dire que nous devons disposer de certaines informations et qu’ensuite, il nous appartiendra d’en juger. Est-ce qu’avoir des poursuites est un élément important ou pas ? Selon moi, cela dépend aussi de la qualité de ces poursuites : s’il s’agit de problèmes fiscaux, ou d’AVS, ce sera différent que le résultat d’un litige de droit privé, par exemple. Ce sont là nos prérogatives et je pense que nous avons la légitimité d’être informés et éclairés afin de prendre une décision en toute connaissance de cause.

Pour terminer, je crois à la vertu du dialogue. Ainsi, je crois que le fait de demander certaines informations permet de révéler des situations potentiellement problématiques. Je suis convaincu que si nous avions disposé d’un tel filtre, à l’époque, la situation de notre ancien collègue ne se serait pas posée de la même manière et que nous aurions certainement pu éviter la problématique.

Enfin, vous me permettrez une petite pique : notre collègue Mahaim n’est pas avare de grands discours sur la transparence de la vie politique et sur le devoir d’exemplarité des élus politiques, alors je m’étonne vivement que l’on fasse volte-face, sur ce sujet, pour dire qu’il n’y a pas de problème et que c’est aux partis de régler la question. Notre collègue Mahaim me semble avoir donné la réponse tout à l’heure : comment les partis, dont les appareils sont très variables – le PLR est un parti gouvernemental, le parti socialiste et les Verts également, mais de plus petites structures demandent aussi à avoir de temps en temps leur place à la présidence du Grand Conseil – vont-ils s’équiper d’une commission d’éthique pour faire des contrôles afin de savoir si leur candidat présente toutes les garanties nécessaires pour assumer la tâche d’exemplarité d’un président du Grand Conseil ? Poser la question, c’est y répondre : c’est simplement impossible !

Par ailleurs, la question de la confidentialité est intenable. Je ne vous cacherai pas qu’au sein du PLR, dans la préparation des élections cantonales de 2022, ce sont des filtres que nous avons renforcés. Nous avons créé une commission d’éthique et établi un questionnaire, avec des questions relativement basiques, de manière à être renseignés sur les éventuelles problématiques que pourraient rencontrer nos élus. Nous avons les moyens de le faire et nous allons assumer cette tâche et instaurer ce dialogue. Il n’y a aucune raison pour que ce Parlement se prive de ce moyen, s’agissant de l’élection à la présidence du Grand Conseil.

On m’a demandé qui procédera à ces contrôles. Je suis prêt à en discuter avec vous, puisque le texte prévoit un renvoi en commission, comme l’a précisé le rapporteur de la majorité de la commission. On peut imaginer que la Commission de présentation qui passe au filtre les juges cantonaux fasse ce travail ; c’est une idée… Il pourrait aussi s’agir du futur Conseil supérieur de la magistrature, ou d’une délégation du Bureau. Il conviendra que nous trouvions l’architecture la plus adéquate pour garantir la confidentialité des éléments. Néanmoins, je pense que nous allons trouver une bonne solution pour l’élection à la présidence du Grand Conseil. Dès lors, je vous remercie de soutenir ce texte, afin que nous puissions trouver l’architecture adéquate qui est nécessaire pour assurer une élection transparente à la présidence du Grand Conseil, avec toutes les garanties nécessaires, même si je suis parfaitement conscient que si nous évitons certains problèmes, nous n’éviterons pas certaines difficultés. Encore une fois, je crois à la vertu du dialogue et des échanges ; un certain nombre de règles qui permettront de faire sortir des problèmes, s’il devait y en avoir.

Mme Graziella Schaller (V'L) —

Représenté lors des travaux de la commission par Mme Dominique-Ella Christin – qui m’a priée de vous lire le texte suivant – le groupe vert’libéral, dans sa grande majorité, soutiendra la prise en considération de la motion et son renvoi à une commission du Grand Conseil.

La mise sur pied d’une procédure permettant à un organe du Grand Conseil de procéder à la vérification de la probité du candidat, dès le dépôt de la candidature d’un élu à la deuxième vice-présidence du Grand Conseil, apparaît globalement comme légitime. Bien sûr, on peut être sensible à l’argument des opposants à cette proposition qui estiment que la tâche de contrôle des candidats devrait incomber uniquement aux partis politiques qui présentent la candidature et non à un organe du Grand Conseil. Il est vrai que les critères d’évaluation sont de nature politique, car une appréciation et un arbitrage sont potentiellement nécessaires lors de l’examen des pièces telles que les extraits de l’Office des poursuites ou du casier judiciaire. Toutefois, les arguments en faveur de la mise sur pied d’une procédure formalisée lors de la désignation d’un futur candidat à la présidence du Grand Conseil l’emportent. En effet, c’est précisément parce que les critères d’évaluation des candidats divergent selon les partis et qu’ils sont de nature politique, qu’il apparaît préférable de définir certaines règles s’appliquant à tous, indépendamment du parti. Ce mode de faire apportera plus d’homogénéité et de transparence dans la vérification. Le système permettra ainsi de mieux protéger l’exemplarité de la fonction de président du Grand Conseil, qui représente l’institution du Parlement dans son ensemble.

M. Alexandre Démétriadès (SOC) —

Le motionnaire l’a dit, son texte fait suite à une situation concrète, une expérience vécue par le Parlement qui a été particulièrement compliquée à gérer. L’exposé de notre collègue Mahaim l’a moins mis en avant, mais il convient de ne pas négliger le contexte de cette intervention. Ensuite de l’expérience acquise, il y avait plusieurs moyens d’intervenir. Une des voies est celle qu’a empruntée M. Buffat, mais d’autres auraient pu consister en des mécanismes de révocation, alors que d’autres solutions peuvent exister.

Par contre, même s’il a dit que des discussions auraient lieu si la motion était prise en considération, dans son développement, le député Buffat a négligé tous les problèmes que poserait concrètement l’application de la motion : quel organe choisir, quels critères, où placer le curseur… De ce point de vue, l’exposé de notre collègue Mahaim était parfaitement éloquent. Même si a priori je pouvais être favorable au texte de M. Buffat – surtout si je vous rappelle le calendrier de son traitement, soit en mai 2020, quelques mois après l’événement qui avait suscité son dépôt – de même que la quasi-unanimité du groupe socialiste, je vais m’opposer à la prise en considération de la motion et je vous encourage à faire de même pour les raisons déjà évoquées, dont notamment le rôle des partis qui est à souligner. De plus, la motion est trop contraignante sous cette forme et posera forcément des problèmes pour le traitement. Il y aurait pu y avoir une ouverture avec un postulat… mais voilà !

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je trouve assez cocasse que, parmi les mêmes qui avaient demandé la démission du président, on retrouve un rapport de majorité et un rapport de minorité portés par la gauche. A bon entendeur, salut !

Pour notre parti politique, il y a deux façons de procéder pour l’élection au Grand Conseil vaudois : premièrement, avec un extrait de casier judiciaire et deuxièmement avec un acte de défaut de poursuites. Certains districts décident aussi de mettre en place le système du curriculum vitae. Un premier filtre est donc déjà fait avant même de figurer sur les listes politiques. Ensuite, les élus qui peuvent prétendre à la présidence sont assis parmi nous. Par ailleurs, la Commission de présentation, qui a été citée à plusieurs reprises, a pour mission de filtrer les candidats que nous recevons, lors de l’entrée des candidatures, puis avec le curriculum vitae, l’acte de poursuite, ainsi que le casier judiciaire. Après cela, vient une audition sur différents thèmes et, enfin, la présentation ou non des candidatures au Grand Conseil. Il nous est arrivé quelquefois de ne pas prendre des candidats parce que deux ou trois points n’étaient pas à jour ou pas au clair. Mais au milieu de l’année législative, au moment où est intervenu cet événement dérangeant – surtout pour lui et notamment pour la suite de sa carrière – au moment du départ de l’ancien président en place, on ne pouvait pas prévoir ce qui allait arriver.

Sur cette question, mon groupe politique sera partagé. Les arguments de M. Mahaim sont intéressants, même si je n’adhère pas à tous. Je m’étais affilié au rapport de la majorité de la commission et je vais rester fidèle à ma position. Pour ce cas particulier, même si je ne voudrais pas donner du travail à la Commission de présentation, cette dernière pourrait s’avérer être la piste la moins contraignante et la plus rapide pour la deuxième vice-présidence et la première vice-présidence. Nous pourrions aussi prévoir de demander à chaque personne en lice pour accéder au Bureau du Grand Conseil un curriculum vitae, un acte de poursuite, etc. Il me paraîtrait logique de partir de la deuxième vice-présidence, ce qui permettrait d’élire une présidence plus ou moins « clean ». Je rappelle qu’il peut aussi arriver des problèmes pendant la présidence et c’est ce que nous avons rencontré il y a une année et demie. C’est la raison pour laquelle mon groupe sera partagé au moment du vote. Pour ma part, je soutiendrai le rapport de la majorité de la commission. Il me semble que nous devons travailler en toute transparence et je n’ai pas trop de souci pour cela.

M. Jérôme Christen —

Le groupe des LIBRES n’aura ni présidente ni président, à court ou à moyen terme et vous allez donc entendre le point de vue d’un groupe neutre sur la question. Bien sûr, le rôle des élus politiques est de faire des propositions pour trouver des solutions aux maux dont souffrent notre société ou nos institutions. Votre engagement prouve, séance après séance, que notre Parlement joue ce rôle – comme aussi notre gouvernement, de son côté. Mais les remèdes ne doivent pas être pires que le mal, or il arrive malheureusement parfois que nous tirions au canon sur des mouches et dans un tel cas, on a non seulement toutes les chances de manquer sa cible, mais aussi de faire des dégâts.

Dans le cas qui nous occupe, le texte propose une mesure lourde et générale, pour un cas unique. Depuis que je m’intéresse de l’extérieur ou de l’intérieur aux travaux du Parlement, soit depuis environ 40 ans, je n’ai pas le souvenir d’un autre cas du type de celui que nous avons vécu en 2020. Et vous voudriez prendre des mesures lourdes pour un cas probablement unique dans les annales du Grand Conseil vaudois ? Au vu des nombreux filtres qui existent déjà, il ne devrait pas se reproduire, à moins que vous ayez un jour une bande d’incapables à la tête de vos partis – cas de figure peu plausible, vous en conviendrez – et que le Grand Conseil soit trompé sur la qualité de la candidate ou du candidat.

Si nous examinons maintenant la mesure proposée, la motion demande la mise en place d’un système consistant en un filtre éthique qui serait un organe du Grand Conseil – le Bureau, voire une commission d’éthique ad hoc – en amont de l’élection de la présidente ou du président du Grand Conseil. La probité et la réputation des candidates et des candidats seraient examinées par cet organe avant l’élection du premier citoyen du canton. Les candidats devraient fournir un extrait de leur casier judiciaire et du registre des poursuites, et signer une déclaration formelle valant engagement de probité et d’exemplarité. C’est ce qui figure dans les rapports. Mais n’appartient-il pas aux partis politiques, qui engagent leur image, de faire cette demande et, le cas échéant, de faire une appréciation sur la qualité des candidates et des candidats qu’ils présentent ? Cette responsabilité ne devrait-elle pas être de leur ressort, plutôt que de la déléguer au Bureau du Grand Conseil ou à un organe éthique qui aura toutes les peines du monde à trancher les cas litigieux de manière objective et sans tomber dans l’arbitraire ?

J’en mets ma main au feu : si nous débattons aujourd’hui de ces critères, nous aurons des dizaines de visions et de versions différentes, qui ne nous permettront pas de tomber d’accord. Bien sûr, au sein de ce futur organe, les décisions seraient prises à la majorité et la minorité s’y soumettrait, mais inévitablement, toute décision désagréable provoquerait une polémique. De notre point de vue, cette tâche d’appréciation revient aux partis politiques, en fonction de leurs valeurs. Or, si certaines de ces valeurs peuvent être communes, on voit bien, à chaque séance, qu’elles peuvent aussi varier considérablement. Il s’agit d’appréciations politiques qui ne peuvent être confiées à une institution, qui doit elle-même prendre des décisions basées sur des règles précises et éviter d’être confrontée à des choix contestables. Les exemples donnés par M. Mahaim sont éloquents. Le problème avec la morale, c’est qu’elle varie d’une personne à l’autre et d’un parti à l’autre. Il n’appartient donc pas à un organe institutionnel de faire une appréciation sur la morale des uns et des autres. Les LIBRES ne soutiendront pas la proposition de notre collègue Buffat.

M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) —

S’il est besoin de prouver qu’il est possible de mettre un filtre, afin d’éviter quelques désagréments, il suffit de revenir un mois en arrière, lorsqu’un choix cornélien a dû désigner les membres de la commission d’enquête parlementaire (CEP). Le Bureau a très bien su mettre un filtre dont j’espère qu’il s’avérera performant. Dès lors, je vous invite à accepter la motion de M. Buffat.

M. Marc Vuilleumier (EP) —

Notre groupe pense que la proposition de M. Buffat s’inscrit dans une tendance actuelle de la société, consistant à vouloir une société de plus en plus hygiéniste, normative, bien-pensante, où l’on ajoute des strates aux strates. Nous estimons, de notre côté, que c’est le rôle des partis que de faire ces contrôles pour la présidence du Grand Conseil. Si par malheur – mais c’est fort peu probable – je faisais partie de la commission chargée d’examiner un candidat à la présidence du Grand Conseil qui aurait dansé, ou joué du tennis dans la salle d’attente d’une grande banque, cela ne serait pas du tout rédhibitoire pour moi, mais pourrait l’être pour une autre personne. Pour éviter ces discussions complètement stériles, nous soutiendrons le rapport de la minorité de la commission.

Mme Séverine Evéquoz (VER) —

Je voudrais exprimer la position du Bureau du Grand Conseil, qui a été sollicité par la commission – et je rappelle qu’il agit toujours dans le cadre de ses compétences. Le Bureau du Grand Conseil est réservé quant à cette motion. A ses yeux, les élus ou candidats à une élection doivent assumer leur responsabilité individuelle et les partis politiques ont aussi un rôle à jouer dans la vérification des candidatures qu’ils présentent. En lieu et place de la motion, le Bureau envisage plutôt une discussion plus franche, au moment du dépôt de la candidature d’un élu à la deuxième vice-présidence du Grand Conseil. Concrètement, le Bureau estime ne pas avoir à jouer le rôle de filtre, et il privilégie plutôt une discussion interne, au moment de cette élection importante qui lance le cursus pour atteindre par la suite la présidence.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Jérôme Christen a parlé d’or. Qu’est-ce que c’est que cette combine ? Je reconnais que le représentant du parti socialiste a été particulièrement « pâteux » dans sa façon de parler, montrant ainsi qu’il était un peu gêné aux entournures. A ce sujet, M. Jobin a fait une critique tout à fait adaptée. James Bond a dit : « Demain ne meurt jamais ». On ne va pas faire une enquête parce vous devez mourir une fois, ou bien ? Il est arrivé, une fois, une histoire désagréable, mais cela remet-il en cause le fonctionnement général du Grand Conseil depuis 1803 ? Sûrement pas ! Les partis sont priés de faire leur enquête ; c’est ensuite leur tâche de présenter un candidat, tout en sachant que nul n’est parfait en ce bas monde. Cette manie qui consiste à prévoir, presque cinq ans à l’avance, qui sera oui ou non présidente ou président du Grand Conseil, me semble être une ineptie. Chaque année, nous avons la possibilité de changer d’avis au moment d’élire la deuxième vice-présidence, la première vice-présidence et finalement la présidence. Cela nous laisse trois ans, c’est suffisant.

Je rappelle aussi que l’on prête serment et que, lorsqu’on ne respecte pas le serment prêté, on est parjure. Je vous rappelle qu’une fois, le Grand Conseil a dû s’exprimer, à huis clos, sur un parjure et que ce n’est pas rien. Je pense qu’il faut laisser les choses comme elles ont toujours été et que M. Christen a parfaitement raison. Ça m’étonnerait que des cas comme celui que nous avons vécu se reproduisent fréquemment durant les 20 prochaines années. Alors, on se calme et on obéit à l’histoire !

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Bien sûr, dans le cadre de cette élection, il est possible de changer d’avis jusqu’à la dernière année. Certains ne se privent d’ailleurs pas de changer d’avis assez régulièrement. De la même manière que, dans la fameuse affaire qui nous a occupés, on ne s’est pas non plus privé de brasser tout cela ni de demander la démission de la personne en question – je me demande d’ailleurs en vertu de quoi. Aujourd’hui, ce sont les mêmes qui s’opposent à toute mesure de contrôle ou de filtre. Il faudra pourtant choisir.

Pour ma part, je reste convaincu que ce type d’affaires – qu’il s’agisse de la présidence du Grand Conseil ou d’autres élections nationales ou au Conseil d’Etat – va se reproduire. Avec les réseaux sociaux et la curiosité de plus en plus intrusive de la presse, c’est inévitable. Soit on a la mémoire courte, soit on refuse de voir les choses comme elles sont, mais en tant que président de parti, j’ai vécu des élections communales pour lesquelles l’on a été rechercher des courriels, des posts Facebook qui dataient de 2012, etc. C’est une illusion ou un déni de réalité que d’imaginer que les choses vont encore se dérouler comme en 1803. Ce n’est plus la même société, ni les mêmes moyens de communication, ni la même exigence de la part de la population.

D’ailleurs, une partie de cet hémicycle ne se prive pas de nous le rappeler régulièrement en disant qu’il faudrait faire quelque chose quant aux exigences de probité des élus – s’agissant de cadeaux, par exemple. Il me semble qu’il n’est pas très compliqué de demander :

  • avez-vous eu affaire à la justice, si oui pourquoi ?
  • Avez-vous des arriérés d’impôts ?
  • Toutes les dettes fiscales exigibles ont-elles été payées ?
  • Avez-vous été taxé d’office ?

Nous sommes quand même en droit d’attendre un minimum du premier citoyen du canton de Vaud. Vous voulez refiler la patate chaude aux partis ; le président qui vous parle vous en remercie. Mais sachez que lorsqu’on fait des démarches pour des demandes de renseignements, on est rarement bien reçu, je vous l’assure. Les mêmes qui nous disent qu’il s’agit d’une question de responsabilité individuelle nous répondent de nous mêler de ce qui regarde et qu’ils n’ont pas de comptes à rendre, le seul qui vote étant l’électeur. Il faut être cohérent : si l’électeur peut voter, y compris pour une personne qui a fait l’objet d’une condamnation, la personne vous dira : « qu’avez-vous à m’empêcher d’être candidat ? C’est le Grand Conseil qui m’élira ou qui ne m’élira pas à la présidence du Grand Conseil, ou à tel ou tel poste auquel je suis candidat. »

C’est une fausse réponse : tous les arguments qui s’opposent à la proposition peuvent être repris tels quels vis-à-vis des partis eux-mêmes, et de surcroît les partis ont parfois des statuts, mais ils n’ont même pas de loi. On peut d’ailleurs se poser la même question du rôle des partis s’agissant du cumul des mandats. Dans cet hémicycle, un jour viendra peut-être où l’on dira qu’il faut limiter les mandats et inscrire cela dans une loi publique. Je me réjouis d’entendre ceux qui nous disent aujourd’hui que cela relève de la responsabilité des partis, sur ce type de proposition. J’ai le sentiment que leur avis ne sera pas le même.

Ce qui est demandé me semble être un minimum. Compte tenu de la fonction, on doit avoir ce petit filtre avant une élection. Pour ma part, je reste convaincu que c’est proportionné et raisonnable et que l’on arrivera à des solutions en instillant un dialogue avec la personne concernée et en ayant un minimum de contrôle.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Je rebondis sur le rôle des réseaux sociaux. Il faut entrer en résistance vis-à-vis des gens qui aimeraient que vous soyez parfaits, mais à qui il ne faudrait surtout rien demander. Un être humain ne peut pas être parfait. Un être humain ne peut pas vivre 80 ans en étant tout le temps parfait. C’est impossible et je le sais : je soigne des gens depuis plus de 40 ans. C’est une question d’humanisme. A ceux qui veulent des gens parfaits, je propose ceci : on élit un robot que l’on nomme présidente ou président du Grand Conseil – cela dépend du genre de cheveux qu’on lui greffe sur la tête. Toutefois, même ainsi, il ne sera pas parfait, parce qu’il va tomber en panne, comme n’importe quel être humain.

M. Buffat a parfaitement raison sur le fond : on ne doit plus accepter un certain nombre de choses que l’on nous présente comme étant inévitables, parce que c’est moderne, parce que c’est sur les réseaux sociaux, etc. Non, non et non ! Ces réseaux font énormément de dégâts humains, souvent pour rien, parce qu’au bout de 48 heures, on a déjà oublié ce qu’ils ont dit, mais ceux qui doivent en souffrir ne peuvent parfois pas l’oublier pendant longtemps. Je ne voudrais pas que la présidente ou le président du Grand Conseil dépende des réseaux sociaux.

M. Jérôme Christen —

M. Buffat a fait la démonstration qu’il fallait refuser sa proposition. Si la presse et les réseaux sociaux jouent le rôle décrit par notre collègue Buffat, en faisant circuler l’information et en mettant les politiques à nu, nous n’avons pas besoin d’un nouveau filtre. Les réseaux sociaux et les médias joueront ce rôle.

M. Raphaël Mahaim (VER) — Rapporteur-trice de minorité 1

Je vous remercie toutes et tous pour ce débat intéressant. Quelques collègues malicieux m’ont glissé qu’il y avait eu des cas de femmes élues et condamnées. Je ne sais pas si c’est un pas en faveur de l’égalité, mais il y a en effet eu quelques cas durant ces dernières années. Je vous laisse en tirer l’appréciation que vous souhaitez. (Réactions.)

Madame Schaller, il ne s’agit pas d’un renvoi en commission. Nous avons déjà traité de cet objet en commission. Si ce texte est adopté sous sa forme de motion contraignante, cela suppose la préparation d’une nouvelle base légale. Nous en sommes à un stade avancé de la procédure c’est pourquoi c’est le moment ou jamais de dire ce que l’on pense de cet objet.

Monsieur Chevalley, je suis navré de le dire, mais la comparaison que vous faites avec la CEP est, dans le meilleur des cas inélégante et, dans la réalité, carrément erronée. La CEP est fondée sur une logique analogue à ce que l’on fait en cas de récusation : lorsqu’on est trop proche de la situation dans laquelle on doit investiguer, on doit se récuser et sortir des discussions. Ces critères ont été fondés sur la loi. Tout le monde comprend que si l’on est le frère de Daniel Rosselat et que l’on siège dans une commission qui doit attribuer des millions au Festival de Paléo, on doit se retirer de la commission. Au-delà de cet exemple caricatural, c’est de cela qu’il s’agit. Encore une fois, la comparaison avec l’objet qui nous occupe n’est pas pertinente.

Revenons un instant à la malheureuse affaire qui nous a occupés. J’ai d’ailleurs une petite pensée pour notre ancien président, parce que, au-delà de ce qu’il a fait, personne n’envie le sort qu’il a subi dans la presse ; cela a vraiment dû être difficile à vivre. Très concrètement, admettons que nous ayons eu ce système de commission avec un filtre d’éthique lors de la préparation de l’élection de notre ancien président au perchoir. Toujours par hypothèse, admettons que ledit candidat ait dit à cette commission qu’il y avait une procédure pénale en cours contre lui – même si la présomption d’innocence existe – pour telle ou telle raison. Qu’aurait fait la commission dans cette situation ? Elle aurait donné elle-même un préavis négatif en disant : « Quelle horreur, il y a une infraction pénale en cours, il ne faut surtout pas aller de l’avant avec cet affreux personnage. » Très franchement, il faut tout de même y aller pour dire cela. Ou alors, elle aurait fait rapport au plénum en l’invitant à ne pas élire ce « gugusse », parce que c’est un affreux personnage... Pouvez-vous imaginer le déballage, pour la personne en question ? Sincèrement, il est intolérable de l’imaginer, dans ces conditions. De toute évidence, à un certain moment, si la personne en question ou son parti n’ont pas vu le problème, il y aura un battage médiatique et la situation que nous avons connue. Mais je ne vois pas comment cela pourrait bien se passer en le faisant en amont, dans le cadre institutionnel.

Il reste un dernier argument que personne n’a évoqué jusqu’à maintenant : la motion Buffat cible la présidence du Grand Conseil, ce qui signifie que c’est le seul élu pour lequel on procéderait ainsi. Quant aux présidents des commissions de surveillance, qui ont un rôle assez important, on s’en fiche ! Ce n’est pas grave ! D’autres fonctions importantes du plénum, on s’en fiche ! Pas grave ! Et le pompon : le Conseil d’Etat, on s’en fiche ! Ce n’est pas grave, il n’y a ni filtre éthique ni discussion en amont. Les conseillères et conseillers d’Etat peuvent traîner toutes les casseroles qu’ils veulent, personne ne viendra leur poser la question, en amont. S’imposer cela pour la seule présidente ou le seul président du Grand Conseil, c’est une absurdité dans le système et je ne vois pas comment elle pourrait être institutionnellement soutenable et utile. Pour le reste, tout a été dit : je vous invite à refuser la motion de notre collègue Marc-Olivier Buffat.

M. Jean Tschopp (SOC) — Rapporteur-trice de majorité

C’est un débat animé. Evidemment, on peut estimer que c’est le rôle des partis que de faire le travail de vérification, quand une candidate ou un candidat se profil, au sein d’un parti, pour la présidence du Grand Conseil. Est-ce plus simple ? Je ne le pense pas. Est-ce que cela garantit plus de confidentialité aux informations du candidat ? Je ne le pense pas et bien au contraire. Je pense en effet que, au sein d’un parti, l’information circule beaucoup plus librement et facilement qu’au sein d’un organe à part, de trois personnes, qui n’est pas composé de membres du Grand Conseil.

A qui a profité l’épisode douloureux de l’ancien président du Grand Conseil, amené à démissionner ? En tout cas pas à lui-même ; on peut avoir une pensée pour la victime, mais c’est bien de penser aussi à l’individu qui a dû se retirer. Cet épisode n’a certainement pas profité à son parti, non plus, comme il n’a pas non plus profité à ce Parlement. Il faut se souvenir que la confiance entre les électeurs et les élus s’entretient ; elle n’est jamais acquise. Finalement, c’est la question qui se pose : estimons-nous qu’il y a quelque chose à faire ? Ou trouvons-nous que c’est trop compliqué ? On parle beaucoup de démagogie, d’une ambiance de « tous pourris » ou « tous les mêmes ». Le rôle de président du Grand Conseil, qui ne représente pas uniquement l’individu, mais le Parlement dans son ensemble, ce n’est pas anodin ! On ne peut pas faire un inventaire à la Prévert des personnes élues, à gauche, à droite ou au centre, qui n’ont pas exercé de rôle avec le statut de président d’un Parlement et, en même temps, dire que ce que l’on fait est anecdotique parce que l’on se préoccupe uniquement du président du Grand Conseil. On ne peut pas dire tout et son contraire ! Cette procédure est-elle insurmontable ? Faire cet exercice, une fois par année, pour les candidats à la présidence et à la vice-présidence du Grand Conseil, avec trois magistrats qui seraient en charge de deux ou trois vérifications – ce qui permettrait aussi d’avoir un échange – est-ce insurmontable ? Je n’en ai pas l’impression.

En conclusion, si l’on veut tendre à un minimum d’égalité de traitement, il faut travailler sur une procédure qui permette de s’en approcher. Cette égalité de traitement, nous ne l’aurons jamais entièrement – c’est une réalité – mais si on laisse cela aux partis, les options prises seront très différentes, dans un cas comme dans l’autre. Je pense que ce n’est pas nous rendre service que de le faire. Voilà, en quelques mots, ce qui a incité la majorité de la commission à soutenir ce texte.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil refuse la prise en considération de la motion par 69 voix contre 45 et 11 abstentions.

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