Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 23 avril 2024, point 19 de l'ordre du jour

Texte déposé

Le travail non déclaré est courant et extrêmement négatif pour plusieurs raisons. En voici trois :   

 

  1. Le travail au noir est néfaste pour les employés eux-mêmes car ils ne sont pas assurés contre les accidents, les charges sociales dues ne sont pas payées et cela mène mécaniquement à des situations de précarité une fois arrivé à l’âge de la retraite.
  2. Cette somme échappe aux prestations sociales ce qui amène un manque à gagner très important pour l’Etat (on estime, en Suisse, à environ CHF 320 millions par année pour l’AVS).[1]
  3. Pour les employeurs qui ne déclarent pas leur employés, les risques de rattrapages peuvent s’avérer extrêmement coûteux et ils sont, eux aussi, dans l’illégalité.[2]

 

Le problème du travail au noir n’est pas anecdotique puisque selon les estimations du SECO, en Suisse, on estime qu’il représente environ 6,1 % du PIB (chiffre de 2023).[3] La seule économie domestique souterraine représenterait environ 1 milliard de francs.

Pour le secteur du ménage, on estime à plus de 25 % la part du travail au noir, ce qui représenterait environ 75'000 personnes.

 

Certes, pour lutter contre le travail au noir, il existe une procédure de décompte simplifiée[4] et des inspections peuvent être effectuées. Néanmoins, ces mesures sont notablement insuffisantes.

A mon avis, des incitatifs pragamatiques doivent être introduits afin de faire évoluer la situation. Pour cela, je propose 2 pistes :

  • Une déduction fiscale
  • Une amnistie pour le passé

En introduisant une déduction fiscale (avec un plafond CHF 5000.- annuel) pour les heures de ménage, on encouragera la régularisation des aides au ménage attendu que seul le travail déclaré sera déductible. Cela réduira le manque à gagner de l’Etat et ne coûtera pas plus cher au final pour l’employeur. Dans le même temps, les employés seront, eux, correctement assurés et cotiseront à l’AVS.

De plus, avec la baisse du travail au noir, l’Etat aura plus de facilité à poursuivre les éventuels fraudeurs qui persisteraient dans l’illégalité.

Afin d’éviter de sanctionner les personnes qui seraient nouvellement régularisées, je propose également de solder le passé avec une amnistie pour les deux parties.

Pour l’employeur, même s’il n’a pas cotisé correctement depuis des années, l’Etat ne sanctionnerait pas le passé à condition que le personnel soit désormais déclaré.

Pour les employés, même s’ils n’ont pas déclaré tout ou partie de leurs revenus dans le passé, je propose que, là aussi, l’Etat ne les sanctionne pas. Il s’agit de récompenser une situation nouvelle plutôt que de s’acharner sur ce qui a été fait.

Dès lors, par ce postulat, je propose au Conseil d’Etat d’étudier la solution suivante :

  • Instaurer une exonération fiscale plafonnée à CHF 5’000.- par ménage employant du personnel de ménage déclaré (engagé en direct ou via une entreprise spécialisée).
  • En cas de régularisation spontanée, instaurer une amnistie fiscale tant pour l’employeur que pour l’employé et ne pas revenir sur des montants indûment touchés dans le passé. L’amnistie devrait avoir une durée limitée dans le temps (à définir). Passé cette amnistie, les sanctions usuelles s’appliquent.
  • Evaluer si les actions d’informations pour lutter contre le travail au noir auprès des employés devraient être perfectionnées ou mieux ciblées.

 

[1]https://www.blick.ch/politik/abstimmungen/studie-zum-bschiss-in-schweizer-haushalten-schwarzarbeit-von-putzfrauen-und-nannys-kostet-ahv-320-millionen-id7327081.html

[2]En cas de dénonciation ou de découverte fortuite du travail non déclaré effectué chez eux, on peut arriver à plus de 100'000 de rattrapage fiscal pour une seule personne employée (cas réel).

[3] Page 8 du document en lien : https://www.seco.admin.ch/dam/seco/fr/dokumente/Publikationen_Dienstleistungen/Publikationen_Formulare/Arbeit/Personenfreizuegigkeit_Arbeitsbeziehungen/Studien%20und%20Berichte/Berichte_massnahmen_bekaempfung_schwarzarbeit/bericht_bgsa_2022.pdf.download.pdf/Rapport%20LTN_2022_FR.pdf

[4]https://www.ahv-iv.ch/p/2.07.f

 

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Jean-Louis RadiceV'L
Andreas WüthrichV'L
Michael WyssaPLR
Olivier PetermannPLR
Aurélien DemaurexV'L
Circé Barbezat-FuchsV'L
Jerome De BenedictisV'L
Jacques-André HauryV'L
Graziella SchallerV'L
Blaise VionnetV'L
Pierre-André RomanensPLR
Regula ZellwegerPLR
Guy GaudardPLR
Elodie Golaz GrilliPLR
Sébastien HumbertV'L
Nicola Di GiulioUDC
Oscar CherbuinV'L
Laurent MiévilleV'L
Jean-François ChapuisatV'L
Cloé PointetV'L
Josephine Byrne GarelliPLR

Documents

Rapport de commission - RC 23_POS_67 - Regula.Zellweger

23_POS_67-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Regula Zellweger (PLR) — Rapporteur-trice

La commission s’est réunie le 10 janvier dernier, en présence de Mme la conseillère d’Etat Valérie Dittli et de M. Pierre Dériaz, directeur de la division taxation. Je tiens à remercier M. Cédric Aeschlimann, secrétaire de commission, pour la prise des notes de séance.

Les arguments développés par le postulant ont motivé les deux propositions suivantes : d’une part, la déduction fiscale et, d’autre part, l’amnistie. Dans notre canton, environ 8000 à 9000 hommes et femmes de ménage ne cotisent pas – ou que partiellement – n’ont pas d’assurance en cas d’accident, etc. Du côté des employeurs, ce n’est guère mieux en raison des risques de rattrapage, d’amende ou d’accident des employés non déclarés et tout ceci est mauvais pour l’Etat. Des cotisations pas payées, donc des pertes de substance fiscale.

Le postulant souhaite avancer de manière pragmatique sur ce sujet, attendu qu’actuellement le statu quo ne porte pas ses fruits. Mme la conseillère d’Etat abonde dans le sens du postulant et affirme que le problème est bien réel. En ce qui concerne le volet fiscal, la problématique concerne essentiellement les personnes physiques. La conseillère d’Etat souligne que la proposition de la déduction fiscale semble séduisante au premier abord, mais elle se heurte au fait que ces déductions sont réglées au niveau fédéral et ne peuvent pas être traduites dans la loi cantonale. Concernant l’amnistie proposée, un mécanisme figure dans la Loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes, puis dans sa déclination cantonale, mais elle n’est tout simplement pas applicable ni légale dans ce cas de figure.

Dans la discussion générale, l’intérêt commun de lutter contre le travail au noir est clairement appuyé. Néanmoins, il semble compliqué de soutenir ce texte du point de vue légal. Il s’agirait plutôt de questionner le travail au noir en donnant mandat aux cantons de renforcer les contrôles et que, en parallèle, les commissions paritaires s’assurent du respect des CCT ou des contrats types en vigueur. Si la déduction fiscale n’est pas faisable, il paraît vain d’étudier ses effets. Il est rappelé que la protection des personnes concernées est au cœur des discussions sur la précarité et les membres de la commission souhaitent que le thème ne se perde pas.

Un membre de la commission propose d’amender le postulat pour ne conserver qu’une seule demande au Conseil d’Etat : évaluer si les actions d’information et les mesures pour lutter contre le travail au noir auprès des employés et des employeurs devraient être perfectionnées ou mieux ciblées. Cet amendement est accepté à l’unanimité des membres présents. C’est également à l’unanimité que la commission recommande au Grand Conseil de prendre partiellement en considération ce postulat et de le renvoyer au Conseil d’Etat.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. David Vogel (V'L) —

Dans les deux propositions qui vous étaient faites, la première – l’amnistie – s’est avérée illégale et la seconde – l’exonération – relève d’une compétence fédérale, en l’occurrence de la Loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID). Ce projet doit donc être mené à un niveau fédéral. Je m’étais adressé à différentes personnes avant de faire cette proposition, mais j’ai probablement été mal renseigné – ou j’ai posé de mauvaises questions. Dans tous les cas, j’aurais dû vérifier mes sources. J’ai commis une erreur en vous proposant des choses qui étaient soit illégales, soit de compétence fédérale. Je remercie la collègue qui a proposé de sauver mon égo en proposant une prise en considération partielle. Néanmoins, je ne voudrais pas que cela débouche sur un rapport qui nous dit que : « Le travail au noir, ce n’est pas bien ». Mon idée était plutôt d’arriver à quelque chose de concret. De manière générale, les Vert’libéraux sont favorables à la sobriété parlementaire – c’est un très beau principe. Je pense qu’il est bien de s’appliquer ses propres principes à soi-même. Dès lors, en vous réitérant mes excuses pour ce mauvais calibrage et dans le but de ne pas surcharger l’administration vaudoise avec des rapports sans intérêt notable, je vous informe que je retire ce postulat en vertu de l’article 124 de notre Loi sur le Grand Conseil.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close.

Le postulat est retiré.

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