Point séance

Séance du Grand Conseil du mardi 30 avril 2024, point 17 de l'ordre du jour

Texte déposé

Le Chablais est vulnérable face aux crues, notamment du Rhône. Pour réduire ce risque, un projet de troisième correction du Rhône a été lancé il y a bientôt 20 ans.

Entre autres procédures, les plans d’aménagement ont été validés par les cantons du Valais et de Vaud en 2016. Le Grand Conseil vaudois a même voté les crédits nécessaires en 2018. Les communes territoriales vaudoises sont parties prenantes à ce processus et contribuent de manière substantiel à sa réalisation, tant du point de vue administratif que financier. Ce projet est indispensable pour protéger la région mais il est également nécessaire d’un point de vue environnemental et économique puisque les autorisations de construire sont bloquées ou fortement restreintes selon le niveau de danger, ce qui pénalise le développement économique de la région. De sucroît, plusieurs projets déterminants en terme de mobilité pour la région, tel que le palier hydro-électrique Massongez-Bex-Rhône et de nouvelles passerelles ou franchissement de transports publics notamment, dans le cadre de l’élaboration du projet d’agglomération de 5ème génération, sont en attente des évolutions de ce projet d’importance pour la plaine chablaisienne.

 

Or, même si certains travaux ont pu commencer, urgents et concernant uniquement des mesures d’aménagements, la mesure prioritaire du Chablais subit un retard important. Ce retard semble directement lié à la réévaluation en cours du projet par le canton du Valais. La mise à l’enquête, prévue initialement depuis plusieurs années déjà, est ainsi bloquée. Cette situation retarde fortement les travaux de sécurisation et fait courir un risque à la population et aux infrastructures du Chablais tout en péjorant son développement économique.

 

Par la présente résolution, le Grand Conseil souhaite que le Conseil d’Etat mette tout en œuvre pour faire avancer rapidement le projet de troisième correction du Rhône afin de sécuriser le Chablais contre le risque de crues et, ainsi, de permettre un développement qualitatif de toute une région.

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Jean-Marc UdriotPLR
Nicole RapinPLR
Olivier PetermannPLR
Jean-François CachinPLR
Michael WyssaPLR
Pierre KaelinPLR
Grégory BovayPLR
Elodie Golaz GrilliPLR
Cendrine CachemailleSOC
Séverine EvéquozVER
Cédric EchenardSOC
Aurélien ClercPLR
Blaise VionnetV'L
Olivier AgassisUDC
Thierry SchneiterPLR
Circé Barbezat-FuchsV'L
Pierre-Alain FavrodUDC
Gérard MojonPLR
Josephine Byrne GarelliPLR
Nicolas SuterPLR
Philippe GermainPLR
Laurence CretegnyPLR
Jean-Franco PaillardPLR
Jacques-André HauryV'L

Document

24_RES_7-Texte déposé

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Grégory Devaud (PLR) —

Tout d’abord, une petite précision : comme j’étais excusé pour la séance de l’après-midi, mardi dernier, la résolution a été déposée avant midi, ce qui explique qu’un certain nombre de députés annoncés comme signataires de la résolution ne figuraient pas sur le dépôt. Je me suis empressé de corriger cela une fois le quota des 20 signatures atteint. Nous pouvons donc en débattre aujourd’hui.

Le sujet est d’actualité, mais l’inquiétude dans notre région remonte déjà à plusieurs semaines. Cette inquiétude fait suite à certains échos et informations obtenues de la part du canton du Valais, ou de la direction de la troisième correction du Rhône. Même si ce n’est pas un long fleuve tranquille, ce projet avance et doit pouvoir continuer à avancer. Ainsi que je l’ai dit à plusieurs reprises, si je fais de la politique depuis plus de 17 ans, c’est précisément parce que cette troisième correction du Rhône existe. Avec d’autres collègues, dont certains sont encore présents ici aujourd’hui – je pense à mon collègue Favrod et à d’autres – à l’époque, nous avions fondé l’association « Défense du sol agricole » dans le canton de Vaud. Cela avait permis d’économiser de nombreuses surfaces agricoles et également d’optimiser le projet au fil du temps.

Ce projet a fait l’objet de nombreuses études, en termes agricoles, en termes écologiques ou en termes d’impact environnemental forestier. Par ailleurs, tous les aspects d’ordre sécuritaire ont été évalués et réévalués, une fois validés par l’ensemble des parties prenantes, dont notre Grand Conseil. En 2018 déjà, à la suite d’une validation par les deux gouvernements, notre Grand Conseil validait un crédit permettant au canton de s’engager à avancer sur la finalisation des études, en particulier dans le Chablais, mais pas seulement. Il s’agissait notamment d’avancer sur une mesure d’importance : la fameuse mesure prioritaire Chablais (MP Chablais) dont nous avons beaucoup entendu parler. Ce projet résulte aussi d’une collaboration avec de nombreuses autres entités. Je pense tout d’abord au projet d’agglomération qui est aujourd’hui à l’aube de sa cinquième génération, avec notamment des projets de passerelles de mobilité douce, de franchissements ferroviaires et de franchissements pour les transports publics. La collaboration se fait aussi avec un projet souvent discuté ici même, le projet Massongex-Bex-Rhône (MBR) : un palier hydroélectrique. Au fil du temps, ce projet a finalement recueilli l’assentiment de toutes les entités : les communes, les milieux de protection de la nature, les milieux agricoles, les milieux forestiers et – last but not least – tous les milieux de spécialistes de l’hydrogéologie et de la dynamique hydraulique en lien avec ces éléments. Aujourd’hui, nous nous trouvons dans une phase délicate : la MP Chablais aurait dû être mise à l’enquête déjà depuis 2018. A raison, d’autres mesures d’aménagement ont récemment été priorisées avec M. Venizelos : la mesure d’aménagement des grandes îles, précisément pour parer au plus urgent et la sécurisation des digues, malheureusement mal en point et qui présentent certains dangers. La MP Chablais devrait être mise à l’enquête l’an prochain.

Tout récemment, une velléité de refonte du projet est parvenue à nos oreilles, fruit d’un audit piloté par le canton du Valais – je le précise d’emblée, mais loin de moi l’idée de confronter nos deux cantons : je pense que ces deux cantons et ces deux régions sont partenaires depuis toujours, dans le cadre de ce projet, un partenariat qu’il y a lieu de renforcer dans le futur. Je le précise dans mon texte : quand on parle de réévaluation, ou parle aussi d’adaptation et d’évolution possible. Ce projet va s’étaler sur 30 ou 35 ans, jusqu’à sa finalisation et ainsi il connaitra encore des évolutions – et c’est bien normal. Il connaitra des évolutions en lien avec la dynamique du fleuve, ou avec les changements climatiques, mais le Rhône reste un fleuve alpin, avec une dynamique nécessaire de charriage des matériaux. Aujourd’hui, votre responsabilité est de vous assurer que le projet avance afin qu’il puisse être mis à l’enquête, dans le but de récolter un certain nombre d’avis, et le cas échéant, qu’il puisse éventuellement être réévalué. Lorsque j’entends parler d’une refonte complète, je dois bien vous avouer – et je pense que mes collègues le concèderont aussi – éprouver une certaine crainte d’un nouveau départ depuis zéro, que l’on reprenne toutes les études depuis le départ, quitte peut-être à mettre certains aspects de côté, pour faire des économies – je pense en particulier à certains aspects environnementaux.

Aujourd’hui, je vous propose d’apporter notre plein soutien au gouvernement cantonal pour faire avancer ce projet, prendre des engagements auprès du Conseil d’Etat valaisan et renouer un dialogue serein avec ce dernier. Je dis souvent quelque chose qui est particulièrement vrai en termes juridiques : « qui peut le plus peut le moins ». Certes, il s’agit d’un projet d’une certaine ampleur pour lequel des choix politiques et des pesées d’intérêts ont été faits. Il y a peut-être tout de même lieu d’adapter certains éléments et nous n’y sommes pas opposés. Notre but est de poursuivre dans une direction positive et de pouvoir réaliser ce projet, afin de sécuriser les biens et les personnes de la plaine du Rhône et de lui garantir un développement économique. Vous savez que je suis syndic de la commune d’Aigle, et qu’une partie de sa zone d’activité est actuellement recensée dans les cartes des dangers, ce qui entraine des interdictions de permis de construire. Et cet aspect n’est pas le seul qu’il s’agit de faire avancer ; j’ai évoqué d’autres éléments, notamment des projets connexes d’agglomération et les paliers hydroélectriques. Il n’est pas besoin d’avoir fait de grandes analyses pour comprendre qu’aussi longtemps que l’on ne connait pas la largeur d’un fleuve, il parait compliqué de déterminer la longueur d’une passerelle ou d’un franchissement de mobilité douce.

En conclusion, je vous engage à soutenir massivement la présente résolution, à soutenir le Chablais – une région qui le mérite bien – et surtout à soutenir notre gouvernement et à lui enjoindre de tout mettre en œuvre pour faire avancer le projet de troisième correction du Rhône.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Martine Gerber (VER) —

La troisième correction du Rhône doit pouvoir déployer ses effets dès aujourd’hui. Il ne peut être question que ce projet, étudié, consolidé et développé sur au moins deux décennies en concertation avec de très nombreux organismes cantonaux, régionaux et intercantonaux, se voie relégué au rang de querelle territoriale ou partisane, et qu’ainsi les effets attendus pour notre région soient annulés ou retardés, au mépris des engagements pris et de la population. Le Chablais a besoin de ce genre de projet d’envergure et un retard aurait des conséquences graves. Comme mon préopinant l’a déjà précisé, ce projet a été pensé et développé dans le but de protéger la population et ses infrastructures des dangers liés aux crues du Rhône. Le changement climatique doit nous pousser à agir, aujourd’hui.

Ce projet a aussi été pensé pour que notre région puisse se développer : ses infrastructures, ses entreprises, la mobilité de ses habitantes et de ses habitants, la protection de son territoire bâti comme agricole ainsi que ses milieux naturels, sa contribution à la souveraineté énergétique, et j’en passe. En clair, repousser ce projet dans sa dernière phase compromettrait l’immense investissement consenti et pénaliserait le développement qualitatif du Chablais. Nous attendons avec impatience et détermination la validation de la mise à l’enquête des travaux prévus. Ainsi, les Vertes et les Verts vous invitent à accepter cette résolution.

Mme Eliane Desarzens (SOC) —

Mes préopinants ayant été fort complets, je préciserai simplement que le barrage au fil de l’eau prévu entre Bex et Massongex vise, à terme, l’alimentation en électricité de 20’000 ménages. A titre personnel, en tant que députée du Chablais, j’y adhère pleinement. De son côté, le groupe socialiste vous recommande également de soutenir fermement cette résolution.

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Sur le plan institutionnel et d’une manière générale, les vert’libéraux ne sont pas favorables aux résolutions ; nous considérons qu’elles sont attentatoires à la sobriété parlementaire. Ici, nous sommes dans une situation assez particulière. Je ne reviens pas sur le fond, parce que les arguments développés par M. Devaud sont tout à fait convaincants, mais je suis extrêmement choqué que le palier de Massongex – dont nous parlons depuis une vingtaine d’années dans ce Grand Conseil et je suis bien placé pour le dire – soit encore retardé ! Dans cette situation, la résolution est de nature à soutenir une démarche déjà entreprise par le Conseil d’Etat. Les nombreuses personnes qui écoutent l’émission « Forum » ont entendu hier M. le conseiller d’Etat Venizelos nous dire qu’il était intervenu auprès du Conseil d’Etat valaisan. Dans ce cas particulier, un vote unanime de notre Parlement sur cette résolution me semble utile pour soutenir la démarche entreprise par notre Conseil d’Etat.

M. Alberto Mocchi (VER) —

Cela a été dit par M. Devaud : la troisième correction du Rhône est aussi une affaire de renaturation et de mesures environnementales assez ambitieuses, négociées depuis des années entre les pouvoirs publics et les ONG environnementales. Je déclare ici mes intérêts en tant que secrétaire général de Pro Natura Vaud. Au-delà des questions fondamentales de sécurité évoquées, il y a une question de biodiversité. Dans le delta du Rhône, par exemple, il s’agit d’une mesure majeure au niveau national, voire international, pour les zones humides et de nombreuses espèces d’oiseaux migrateurs. Repartir à zéro et imaginer faire sans ce type de mesures, c’est vraiment se tromper ! J’espère que nous soutiendrons toutes et tous cette résolution ; je remercie M. Devaud de l’avoir déposée.

M. Vassilis Venizelos (CE22-27) — Conseiller-ère d’Etat

Je remercie à mon tour M. le député Devaud pour son dépôt. Effectivement, la troisième correction du Rhône fait suite à différentes crues survenues en 1987, 1993 et 2000. Le risque de crues est important dans ce secteur et je rappelle que les dégâts potentiels liés à une crue importante dans le Chablais peuvent se monter à près de 2 milliards de francs, sans compter les milliers de personnes qui pourraient y être exposées. Le projet vise prioritairement à protéger la population et le territoire d’un risque de crues qui est réel.

M. Devaud l’a rappelé, il y a évidemment un risque financier, puisque le projet a été construit depuis plusieurs années, avec le soutien de la Confédération et de l’Office fédéral de l’environnement, en collaboration avec le canton du Valais et avec les différentes communes concernées. Pour le Chablais, on parle d’un projet d’environ 700 millions, cofinancé par la Confédération pour les mesures qui ont été lancées. Or, un récent rapport du Contrôle fédéral des finances nous rappelle que le crédit-cadre pourrait être remis en question si le projet venait à évoluer de façon conséquente. Il y a donc une inquiétude financière importante du côté du Conseil d’Etat.

Enfin, il y a également un risque économique, comme cela a aussi été rappelé. Aujourd’hui, la zone industrielle d’Aigle ne peut pas se développer, car compte tenu du risque de crues, des autorisations de construire ne peuvent pas être délivrées du fait de la nécessité de protéger le secteur à travers la mesure de protection du Chablais. Il y a également des doutes et des inquiétudes sur le palier hydroélectrique. M. Haury l’a rappelé : nous attendons ce palier hydroélectrique depuis maintenant des décennies et les réflexions en cours pourraient compromettre notre capacité à aller de l’avant avec ce projet. Aujourd’hui, la volonté du Conseil d’Etat est évidemment de travailler avec son homologue valaisan. Ces prochains jours, nous aurons des discussions avec des représentants de ce dernier pour trouver un chemin dont nous espérons qu’il nous permettra de conserver le soutien financier de la Confédération et d’avancer le plus rapidement possible sur les différentes mesures indispensables pour permettre le développement économique de toute une région.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close.

La résolution est adoptée à l’unanimité.

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