Interpellation Mathilde Marendaz et consorts - Chaos climatique : que fait l’État de Vaud pour faire payer les responsables ?
Mathilde Marendaz
23.08.2022
DFA
DJES, DITS
22_INT_96
-
28.11.2022
Transmise au CE, 30.08.2022
Texte déposé
Ce n’est pas chose nouvelle, mais cet été, nous avons toutes et tous constaté les vagues de chaleurs sans précédent qui ont touché la Suisse, la France et d’autres pays en Europe. La pire sécheresse enregistrée en Suisse depuis 1976 nous paraîtra toute relative en comparaison des événements dramatiques à prévoir dans une dizaine d’années. Les prémices de la catastrophe climatique ont déjà leur lot de conséquences : feux de forêt, détresse pour les agriculteurs ou les viticulteurs face aux cultures, les cyanobactéries qui se développent par les fortes chaleurs. Quant aux glaciers, ils ont fondu de manière irréversible. Il y a 5 ans, les scientifiques auteurs du rapport du GIEC prédisaient les vagues de chaleur de cette année à l’horizon de 2030. C’est bien plus tôt qu’elles arrivent, laissant présager les pires scénarios pour l’habitabilité de la planète quand l’auteur de cette interpellation aura 40 ans. Nous n’avons encore rien vu: le chaos climatique est à venir.
Dans un monde un minimum sérieux, rien ne devrait se passer comme avant. Nous devrions enclencher le mode “urgence” et démarrer un mouvement de transformation profonde de la société vers la sortie des énergies fossiles et favoriser la sobriété. Dans le canton de Vaud, nous attendons avec impatience les mesures concrètes du Plan climat. Ces mesures ont un coût, et le coût des actions climatiques ne doit pas peser sur les plus précaires, au contraire de la logique des augmentations des charges subies par les locataires suite à l’augmentation du prix du gaz par exemple. Nous devons faire payer les principaux responsables.
Dans notre canton, nous hébergeons financièrement des multinationales qui ont un impact massif sur le dérèglement climatique. Par exemple, Nestlé, numéro un de l’agro alimentaire mondial avec des impacts négatifs et une pression forte sur les ressources naturelles, Nespresso, le siège du constructeur automobile Nissan, Starbucks Coffee Trading, British American Tobacco ou encore Vale international qui a des impacts écologiques majeurs au Brésil. Et ces entreprises génèrent annuellement des profits privés importants.
De la même manière, nous ne manquons pas dans notre canton d’héberger des grandes fortunes. Or, le rapport du GIEC du printemps dernier nous informe que les plus riches polluent plus que tout le monde. Il paraît logique que ces grands contribuables, qui polluent plus que les autres en tirant profit d’un système qui est à l’origine des crises, participent plus grandement aux efforts climatiques. Les ultra-riches émettent à la fois bien plus de CO2 que le reste de la population, mais ils profitent également du système pour générer des profits dans des domaines polluants. D’après l’ONG Oxfam, l’empreinte carbone des 1% les plus riches du monde sera 30 fois supérieure à celle compatible avec la limitation du réchauffement à 1,5°C d’ici 2030, fixée lors de l’Accord de Paris. En comparaison, l’empreinte carbone des 50% les plus pauvres restera bien en-dessous de cette limite. En Suisse, le nombre de milliardaires en Suisse a fortement augmenté ces dernières années, arrivant à 130 personnes. La fortune des 300 personnes les plus riches a également doublé depuis l’an 200, passant de 400 à près de 800 milliards. Les fortunes des 300 personnes les plus fortunées ont augmenté de 5.5% par année dans les 10 dernières années. Il est nécessaire que ces profits qui augmentent, et sont ciblés par les rapports climatiques comme étant les plus polluants, participent à la lutte contre la crise climatique. En outre, les investissements des ultra-riches continuent de s’orienter vers la maximisation du profit: aujourd’hui, chaque million de francs d’investissements produit entre 125 et 167 tonnes d’équivalent CO2, ce qui correspond par ailleurs à la consommation d’environ 30 suisse-se-s. Les 10 familles les plus riches de Suisse sont donc, par ces investissements, responsables à elles seules pour plus de 39 millions de tonnes d’équivalent CO2, ce qui s’approche de l’empreinte carbone de l’ensemble de la Suisse. Le levier de leur argent doit donc devenir central pour une politique climatique cohérente. À l’échelle mondiale, le pourcent le plus riche consomme trente fois ce qu’il devrait et en Europe, où les émissions sont moins importantes, il arrive à consommer 18 fois ce qu’il devrait tandis que la moitié la plus pauvre de la population consomme à peine le double de ce qu’elle devrait. C’est donc le pourcent le plus riche qui est responsable, bien davantage que la population, d’une quantité astronomique d’émissions.
Il existe l’outil des marchés de droit de polluer pour les entreprises émettrices de CO2, mais il s’agit d’une part d’un outil très peu efficace, car les droits de polluer sont très bon marché pour les grandes entreprises; et d’autre part quand ce système a été introduit, beaucoup de permis ont été données gratuitement donnant le droit à des entreprises de polluer plus que ce dont elles auraient déjà le droit selon une source scientifique. Il est donc nécessaire de réfléchir à d’autres outils fiscaux au niveau cantonal, et une imposition supplémentaire aux droits de polluer. Par exemple, une taxe sur le CO2 plus rigoureuse que la taxe fédérale qui est très laxiste avec les entreprises qui font de belles promesses et “s’engagent à réduire leurs émissions”. Cette taxe pourrait inclure les activités très émettrices de CO2 comme le vol en jet privé ou le chauffage des piscines privées.
Dans ce contexte, la présente interpellation vise à donner une impulsion dans le sens d’une responsabilisation des grands pollueurs ainsi qu’une réparation par les plus riches, responsables objectivement de la situation, dans le financement d’actions climatiques.
Par conséquent, l'auteur de l'interpellation adresse au Conseil d’Etat les questions suivantes:
Le Conseil d’Etat dispose-t-il d’informations précises permettant de déterminer quelles entreprises, quelles activités des particuliers, et quel impact des investissements des personnes résidant dans le canton, sont les plus émettrices de CO2 dans le canton ?
Sur la base de ces informations, quelles mesures le Conseil d’Etat peut-il proposer pour une application plus conséquente du principe de la justice climatique, comme par exemple l’introduction d’une taxe cantonale sur les grands émetteurs de CO2 (entreprises, activités spécifiques comme les vols en jet privé, investissements) ?
Quelles mesures le Conseil d’Etat envisage-t-il de prendre pour renforcer l’imposition des contribuables les plus fortunés, afin de garantir une participation de leur part proportionnelle à leur impact sur le climat, aux mesures de lutte contre le dérèglement climatique ?
Est-il possible d’ajouter une taxe sur le CO2 plus rigoureuses qu'au niveau national, sur les entreprises multinationales hébergées dans le canton de Vaud, afin de l’allouer à un projet du plan climat vaudois ?
Serait-il possible d’établir un rapport sur les implications dans les énergies fossiles ou dans l’impact CO2 des entreprises multinationales hébergées dans le canton de Vaud?
Le conseil d'État a-t-il prévu de s'engager à Berne sur ce sujet, pour permettre de nouvelles possibilités légales permettant une mise en œuvre plus conséquente du principe du pollueur-payeur et de la justice climatique?
Conclusion
Souhaite développer
Documents
Lien | Type |
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22_INT_96-Texte déposé | Intervention parlementaire |
Séances dont l'objet a été à l'ODJ
Date | Décision |
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30.08.2022 | - |
23.08.2022 | - |
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
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David Raedler | VER |
Muriel Thalmann | SOC |
Elodie Lopez | EP |
Géraldine Dubuis | VER |
Martine Gerber | VER |
Carine Carvalho | SOC |
Valérie Induni | SOC |
Nathalie Jaccard | VER |
Denis Corboz | SOC |
Hadrien Buclin | EP |
Sabine Glauser Krug | VER |
Didier Lohri | VER |
Oriane Sarrasin | SOC |
Marc Vuilleumier | EP |
Joëlle Minacci | EP |