Les métiers du bâtiment sont essentiels pour réussir la transition énergétique
Les corps de métiers de l’électricité, du chauffage, de la ventilation sont aux premières loges des mutations à venir.
La conjoncture géopolitique agit comme un coup d’accélérateur dans le cadre de la transition énergétique. L’énergie risque de se raréfier et ses coûts d’augmenter. Tant les ménages privés que les entreprises sont concernés et vont devoir opter pour des économies d’énergie. Directeur de la formation de l’Association cantonale vaudoise des installateurs-électriciens, Jocelyn Spertini relève que le domaine de la construction est particulièrement touché. «Le plus gros consommateur d’énergie est le patrimoine bâti, qui nécessite un remplacement des unités de production d’énergie fossile ou ancienne par des énergies renouvelables.» La stratégie énergétique de la Confédération prévoit d’ailleurs une grande part de l’économie d’énergie dans l’assainissement thermique des bâtiments, c’est-à-dire au niveau de leur enveloppe et de leurs moyens de chauffage. Or, la rénovation s’effectue très lentement. «Si on parle uniquement d’efficacité énergétique des bâtiments devant répondre aux objectifs de la transition, environ 80% du patrimoine bâti suisse nécessite d’être rénové ou adapté alors que 1% par année l’est effectivement», relève Jocelyn Spertini. La production d’énergie à l’intérieur des bâtiments, qu’il s’agisse des systèmes de chauffage, de ventilation contrôlée ou de production d’eau chaude, nécessitera, quant à elle, des installatrices-électriciennes et installateurs-électriciens pour alimenter et raccorder les thermostats, les vannes, les calculateurs de régulation ainsi que la domotique qui peut y être liée. «Le défi est titanesque, témoigne Jocelyn Spertini. Il manque du personnel à tous les niveaux: CFC, techniciens, ingénieurs, dans les domaines de l’électricité, du chauffage et de la ventilation. Le CFC est une opportunité de prospérité pour les jeunes, une qualification profitable toute la vie: les apprentis d’aujourd’hui sont les techniciens et chefs d’entreprise de demain.» Sur la base des compétences acquises durant l’apprentissage, les jeunes ont en effet accès à un large éventail d’études supérieures, notamment celles en lien avec la transition énergétique et écologique, en plein essor.
Un marché en pleine évolution
Le directeur de la formation estime que le service interdisciplinaire et le dépannage, qui représentent 10 à 20% du personnel, sont également amenés à se développer. «Le besoin en service et en maintenance va augmenter.C’est un marché sous-estimé, qui se complexifie. Les opportunités d’affaires et dedéveloppement de carrière sont énormes pour les jeunes intéressés par la technique.» Jocelyn Spertini constate un grand potentiel dans la pose de panneaux solaires. «Actuellement, les panneaux thermiques sont généralement installés par les installateurs en chauffage. Les panneaux photovoltaïques nécessitent un raccordement au réseau par les installateurs-électriciens, mais la pose des éléments peut être effectuée par d’autres professionnels. Or, il n’existe pas de formation officielle, alors qu’il manque entre 20’000 et 40’000 installateurs solaires pour répondre aux besoins.» Métier d’avenir au fort potentiel, cette profession encore à concevoir permettrait de se mettre à son compte. «Pas besoin de beaucoup d’outillage ni de grands locaux, mais de savoir faire et de rigueur pour les tâches qui requièrent des connaissances aussi bien techniques qu’administratives: préparation du dossier technique, demande de subventions, etc.»
Accompagner les jeunes
Pour pallier ce manque de main d’œuvre, Jocelyn Spertini souligne l’importance de soutenir et encadrer les jeunes de manière adaptée durant leur formation. «À mon sens, le niveau des élèves n’est pas moins bon qu’avant, mais ils ont plus de peine à s’autonomiser. Les formateurs et les parents peuvent les amener à entreprendre de manière plus indépendante. Les premiers en s’investissant pour que les apprentis apprennent en suivant le plan de formation et en réalisant des tâches variées et motivantes. Les seconds en garantissant une bonne hygiène de vie à leur enfant et un cadre adapté pour préparer leurs cours. L’objectif étant d’éviter un décrochage dû au décalage entre la vie scolaire et le monde du travail.»
Améliorer l’environnement de travail
Quid des conditions de travail sur le terrain? Là aussi, Jocelyn Spertini note une évolution. «Une attention de plus en plus grande est portée sur l’organisation des chantiers, notamment par rapport aux délais et vis-à-vis des représentants des maîtres d’ouvrage, pour faire respecter les prérequis d’installation. Des chefs de chantiers sont formés pour une mise en œuvre technique, une aide à la conduite et un suivi plus efficace. Dans de bonnes conditions de travail, les apprentis comme les professionnels sont mieux fidélisés.» Des synergies entre les professions, par exemple par la mise en place de cours communs durant l’apprentissage, impactent également les rapports de travail entre les corps de métiers: une meilleure connaissance de leurs tâches respectives mène notamment à davantage de considération.
Zoé Schneider
Office cantonal d'orientation scolaire et professionnelle
Publié dans le 24 heures du 15 septembre 2022