La technique, un domaine d’avenir ouvert aux filles
Promouvoir les métiers techniques: un engagement national et des événements dans les hautes écoles. Exemples à la HEIG-VD.
Les femmes représentent 26% des chercheurs en ingénierie et technologie et 33% des chercheurs en sciences naturelles. Le manque de personnel qualifié est reconnu dans les métiers techniques en Suisse, et la Confédération s’engage à promouvoir la relève dans les métiers MINT (mathématiques, informatique, sciences naturelles, technique),notamment auprès des filles. Sous l’égide de l’Académie suisse des sciences techniques (SATW), des événements sont organisés à l’intention des élèves pour les inviter à découvrir les professions de ce domaine de pointe, et différentes actions sont conçues spécialement pour les filles dans plusieurs hautes écoles du domaine technique. La Haute École d’ingénierie et de gestion du canton de Vaud (HEIG-VD) s’investit de longue date dans ce créneau. Pionnière, elle a mis sur pied l’année préparatoire pour les filles (APFI), qui prépare les titulaires d’une maturité gymnasiale ou spécialisée aux études dans une haute école spécialisée (HES)du domaine technique, et les stages WINS (Women InSciences), destinés aux adolescentesde 10e et 11e Harmos. Pourquoi se lancer dans la technique? À cette question, Vincent Peiris, chef du département TIC à la HEIG-VD, répond: «C’est l’avenir, il y a du travail, et la technique est un domaine créatif qui révolutionne plein de métiers et d’entreprises dans la santé, la mobilité douce, les énergies renouvelables, les robots autonomes ou encore les usines du futur!» L’ingénieur de formation poursuit: «Il faut dédramatiser ces professions auprès des filles et dissiper la perception masculine qui entoure parfois les métiers techniques. Mais il y a encore peu de modèles féminins pour pouvoir tordre le cou aux idées reçues.» Marina Zapater, professeure en systèmes embarqués à la HEIG-VD depuis février 2020, est l’un de ces rares modèles, et elle entend bien jouer son rôle auprès des filles.Responsable scientifique des stages WINS, elle sait depuis toujours qu’elle exerce un métier «très masculin». Pendant ses études de master en ingénierie électronique et en ingénierie en télécommunications à Barcelone, elle a parfois rencontré des moments de solitude, car elle était la seule femme dans l’auditoire. Son intérêt pour l’électronique prend cependant racine dans l’enfance. «Je démontais les appareils pour voir ce qu’il y avait dedans, je voulais en connaître le fonctionnement.» Sensible à la promotion des métiers techniques auprès des femmes, elle se considère comme chanceuse d’être «tombée dedans». «Il faut atteindre les femmes qui n’auraient pas eu cette curiosité intellectuelle toutes petites. Bien sûr, c’est plus facile si on a des parents ingénieurs, sourit-elle. On ne voit pas les perspectives professionnelles des métiers techniques, par exemple dans le biomédical, un domaine qui intéresse en particulier les filles.»
Contourner les peurs
Avec les stages WINS, la HEIG-VD cherche à contourner les peurs en permettant aux jeunes filles d’expérimenter pendant deux jours, lors d’un stage d’immersion qui se déroule, sur inscription, dans les infrastructures de la haute école du Nord vaudois. Valérie Stauffer est ingénieure des médias dans une entreprise internationale spécialisée dans le développement d’instruments de mesure. «Je suis une sorte de couteau suisse. Je peux discuter avec des experts de différents domaines, dont je connais le langage.» Enfant, la jeune ingénieure voulait devenir enseignante primaire – «comme tout le monde», rit-elle. Curieuse, elle s’intéresse à tout, également aux activités manuelles et techniques, un goût qu’elle partage avec son père mécanicien. À la fin de l’école obligatoire pourtant, elle décide de poursuivre à l’école de maturité. «Je n’étais pas mûre pour choisir ma voie, je n’avais pas d’objectifs très solides.» Une révélation C’est au gymnase qu’elle a entendu parler des stages WINS et de l’APFI organisée par la HEIG-VD. Une révélation pour la jeune femme. «Je ne me voyais pas à l’uni, j’avais besoin de pratique.» Si bien que, une fois sa maturité gymnasiale en poche, elle s’est inscrite à l’année préparatoire afin de rejoindre la HES, plus orientée vers les études appliquées que l’EPFL. «C’était génial! J’ai découvert toutes sortes de domaines, j’ai pu souder, coder, gérer des cotations, etc., j’ai eu de la peine à choisir tant tout était stimulant.» De la mécanique à l’informatique en passant par la communication, ses intérêts sont larges. Après un séjour linguistique à Berlin, elle s’est tournée vers une formation unique en Suisse, l’ingénierie des médias, enseignée à la HEIG-VD. Aujourd’hui, Valérie Stauffer se prévaut de compétences polyvalentes grâce auxquelles elle coordonne des campagnes de marketing pour favoriser la diffusion d’un logiciel de laboratoire, tout en suivant une formation continue dans le marketing numérique.
Corinne Giroud
Office cantonal d’orientation scolaire et professionnelle - Vaud
Publié dans le 24 heures du 24 février 2022