Agent de détention, une profession variée au coeur de l'humain

Photo de deux agents de détention
Audrey Belliard-Ducommun et Lucas Martinis sont agent de détention à la prison de la Croisée, à Orbe. Audrey a choisi ce métier pour sa combinaison entre le côté social et le terrain. Luca, lui, a été séduit par le sens des responsabilités et l'encadrement. Yvain Genevay

Entre théorie et pratique, plongez dans le parcours de formation exigeant d’un métier varié au cœur de la société.

Ne leur dites pas qu’ils sont de simples tourne-clés qui passent leur temps à ouvrir et à fermer des portes avec fracas. Encore moins que leurs journées se ressemblent et que leurs tâches sont répétitives. Pour casser les préjugés liés à leur fonction, deux agents de détention, en cours de formation pour obtenir le brevet, et leur formateur révèlent les dessous d’un métier exigeant et profondément humain.

Audrey Belliard-Ducommun, Luca Martinis et Frédéric Bolomey nous reçoivent à l’établissement de la Croisée, à Orbe. Ce centre de détention de 211 places accueille principalement des personnes détenues avant jugement ou condamnées à de courtes peines. Dans une salle de conférences où la devise des membres du Service pénitentiaire vaudois (SPEN) est affichée aux murs - Loyauté, solidarité et crédibilité -, Audrey Belliard-Ducommun partage les raisons qui l’ont poussée à se réorienter dans le métier d’agente de détention en 2023.

«J’avais ce besoin de travailler avec l’humain. Avant de me lancer, j’ai été restauratrice, accompagnante en fin de vie et agente de sécurité. Ce poste est une très bonne combinaison entre le côté social et le terrain», raconte-t-elle. Pour Luca Martinis, titulaire d’un certificat fédéral de capacité (CFC) de menuisier, ce sont plutôt le sens des responsabilités et l’encadrement qui ont guidé son choix. «Après l’armée, j’ai fait un stage et l’environnement m’a vraiment plu. Les missions sont très variées.»

Un apprentissage théorique et pratique

Ne porte pas l’uniforme bleu, emblématique du SPEN, qui veut. Le brevet fédéral nécessaire pour devenir agent ou agente de détention dans le canton de Vaud s’étale sur deux ans. Gage de qualité et de reconnaissance, il est composé d’un programme intensif de quinze semaines de cours, répartis en modules alternant enseignement et mises en situation. «Avant d’accéder au cursus, les candidats doivent valider plusieurs prérequis, notamment des exercices pratiques qui permettent de vérifier leur aptitude à intégrer la profession. Nous demandons également un CFC, et l’âge minimum pour postuler est 24 ans», précise Frédéric Bolomey, formateur depuis quatre ans. Cet ancien agent de détention, lui-même en possession d’un CFC de forestier-bûcheron, est entré à la prison de la Croisée en 2011. Il souligne la richesse du système de formation dual et le fait que ses enseignants viennent du métier, ce qui renforce leur crédibilité.

Éviter les doubles peines

Pour être un agent de détention efficace, certaines qualités sont indispensables: l’empathie, la patience, la résilience ou encore la capacité à gérer des situations tendues. «Il faut être à l’écoute et savoir garder la juste distance. On n’est pas là pour infliger une deuxième peine aux personnes détenues», souligne Luca Martinis. Et Audrey Belliard-Ducommun de compléter: «Il faut essayer de ne pas avoir de préjugés. L’ouverture d’esprit, le tact et la gestion des imprévus sont très importants.»

Des exercices pratiques sont prévus pour préparer les apprenants aux situations les plus délicates. L’importance de la communication, aussi bien verbale que non verbale, est également enseignée pour gérer au mieux les conflits et les tensions, qui font partie du quotidien carcéral.

Loin des routines

Contrairement aux idées reçues, il n’y a pas de journée type pour les agents. Les tâches quotidiennes comportent des missions aussi variées que le contrôle des cellules, les réunions, l’accompagnement des prisonniers, l’administration ou encore la gestion de demandes particulières. «Il faut toujours rester vigilant, et l’on est toute la journée en mouvement. On marche facilement 15 kilomètres par jour», indique Luca Martinis. Lorsqu’un conflit éclate, le dialogue est leur arme principale pour apaiser les situations. «Et si cela ne suffit pas, on peut compter les uns sur les autres. La solidarité est une valeur clé du service.» Les professionnels peuvent également faire appel à un soutien psychologique pour surmonter les événements marquants.

Un métier en évolution constante

Plusieurs formations continues permettent d’affiner les compétences des agents. Audrey Belliard-Ducommun se projette ainsi dans une spécialisation en psychiatrie pour accompagner les personnes détenues, de plus en plus nombreuses, atteintes de troubles mentaux. «Il y a toujours des opportunités d’évoluer et de se former», se réjouit-elle. Luca Martinis, quant à lui, souhaiterait intégrer la brigade d’intervention pénitentiaire, chargée d’agir rapidement pour protéger une personne détenue ou un tiers en cas de danger.

Pour les indécis qui penseraient à postuler, Frédéric Bolomey souligne la qualité de la formation et la richesse du métier. «On apprend beaucoup sur soi, car on travaille constamment avec l’humain. On joue également un rôle social important en favorisant la réinsertion, ce qui est très motivant.»

Une soirée d’information sur le métier aura lieu le mardi 8 avril à 19 h au Mont-sur-Lausanne. Informations et inscriptions: https://www.vd.ch/securite/

Emily Lugon Moulin

Office cantonal d'orientation scolaire et professionnelle

Publié dans le 24 heures du 6 mars 2025

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