Jean Bigoni, vous êtes psychologue au CHUV et proposez des consultations gratuites aux personnes qui s’occupent d’un proche malade ou en situation de handicap. Qui vient chez vous ?
Nous recevons des personnes de tout horizon et de tout âge. Le plus souvent, ce sont des proches aidants de personnes souffrant de troubles cognitifs liés à l’âge. Nous recevons également beaucoup de proches de personnes souffrant de troubles psychiatriques, de maladie oncologique, de handicap ou de maladies chroniques. Nous avons réalisé près de 2’300 entretiens en 2021 dans les quatre antennes cantonales de la consultation.
La consultation psychologique est parfois perçue comme destinée au traitement de problèmes psychiques graves…
Chaque personne a des capacités différentes d’adaptation aux événements de la vie. D’un côté, il y a les pressions externes que l’aidant ressent, telles que la maladie du proche dont il s’occupe, le stress quotidien, l’activité professionnelle et les pressions internes qui viennent du caractère de la personne, ses façons de faire, de penser, de ressentir et de réagir.
De l’autre côté, il y a tout ce qui ressource la personne et qui lui permet de s’adapter aux écueils de la vie. Ce sont, par exemple, la famille, les amis, les loisirs ou les capacités personnelles. Il suffit que les pressions soient un peu trop lourdes et nous pouvons alors vite perdre l’équilibre que nous avions habituellement.
Nos consultations psychologiques ne s’adressent donc pas forcément aux personnes avec des problèmes psychiques graves comme vous le dites mais nous aidons à travailler sur les pressions ou sur les ressources internes pour permettre à la personne de retrouver un meilleur équilibre dans sa vie. Tout un chacun peut traverser des moments de vie difficile et trébucher.
Comment aidez-vous concrètement ?
Il est important de réagir lorsque la personne proche aidante sent qu’elle perd son équilibre. En effet, plus on attend, plus on s’épuise et plus le risque que les choses s’empirent augmente. Il n’est pas rare que les personnes consultent très tardivement. Parfois, elles nous disent qu’elles regrettent de ne pas avoir demandé de l’aide 10 ans plus tôt !
Lors d’un entretien, nous essayons de comprendre avec le proche aidant pourquoi il ou elle a perdu son équilibre. J’ai accompagné, par exemple, une femme qui s’épuisait au détriment de sa propre famille. Durant les entretiens, elle a pu comprendre qu’elle recherchait, au travers de l’aide qu’elle apportait à son père, une reconnaissance qu’elle n’avait jamais obtenue. Cette prise de conscience lui a finalement permis de se repositionner dans sa manière de s’investir et lui a permis de retrouver un nouvel équilibre dans sa propre famille.
Plus d'informations:
Les consultations psychologiques pour proches aidants sont possibles à Lausanne, St-Prex, Montagny-Chamard et Rennaz. Toutes les consultations sont gratuites et confidentielles. Les adresses exactes se trouvent ici
Il existe aussi une ligne téléphonique pour les proches aidants au 0800 660 660 (appel gratuit). Des professionnels écoutent, répondent et orientent.
Extraits d'une interview parue dans le Journal d'entraide familiale vaudoise, août 2022